Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/354

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milieu des ruines. Il avait l’air si sombre que Fiamma en eut peur, elle qui n’avait peur de rien au monde.

« C’est vous ! s’écria-t-il ; que venez-vous faire ici ? Que voulez-vous de moi ? N’êtes-vous pas lasse de me tuer ? Faut-il que je vous aide ? Avez-vous apporté le fer ou le poison ? Êtes-vous un spectre ou une femme ? Pourquoi vous êtes-vous emparée de toute ma vie ? Pourquoi m’ôtez-vous le présent et l’avenir ? Pourquoi êtes-vous revenue ? J’allais guérir peut-être, et maintenant je suis perdu.

— Simon, vous êtes dans le délire, répondit-elle en voulant lui prendre la main.

— Laissez-moi, s’écria-t-il en la repoussant ; ne me touchez pas, je suis capable de vous tuer !… Vous êtes ma damnation, vous êtes l’enfer qui me consume ! Savez-vous ce que vous faites de moi ? un fou et un lâche !… Allez demander à Bonne Parquet ce que je lui ai dit avant-hier, et demandez-moi ce que je vais lui dire aujourd’hui. Tout mon sang ne pourra laver l’insulte faite aux cheveux blancs de son père ; son père ! mon plus ancien ami, mon bienfaiteur, mon père aussi à moi ; car je lui dois tout. Sans lui, je serais retourné à la charrue et j’y serais resté. Oh ! il est vrai que je ne vous aurais pas connue, ou que je n’eusse jamais songé à vous aimer. Et ce vénérable prêtre, qui m’a béni le jour de ma naissance en me disant : « Suis la noble profession de tes pères ; ouvre de ton bras un sillon pénible ; connais la misère, et, avec elle, la résignation ! » ce frère de ma mère, dont la cloche va sonner la commémoration funéraire au lever du jour, il ne serait pas là autour de moi, depuis le lever de la lune pour me reprocher ma faute, pour me dire : « Tu vas faire une infamie ; » et cependant j’aimerais mieux souffrir mille morts et me laisser enterrer sous la boue que de remettre les pieds