Page:Sand - Laura - Voyages et impressions.djvu/148

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levant un pic d’une élévation prodigieuse que mon oncle estima devoir surpasser de beaucoup les sommets de l’Himalaya.

Le courage nous revint ; mais, lorsque la nuit fit disparaître dans ses ombres ce géant du monde, la crainte de ne pouvoir le retrouver et de le doubler malgré nous fut poignante.

Nasias seul ne témoignait aucune inquiétude. Nos pirogues, reliées ensemble par des cordes, naviguaient de conserve, mais au hasard, lorsque le ciel et les eaux se remplirent d’une clarté si vive, qu’elle était difficile à supporter. C’était la plus magnifique aurore boréale que nos yeux eussent encore contemplée, et pendant douze heures son intensité ne faiblit pas un instant, bien qu’elle présentât des phénomènes de couleur et de forme variés à l’infini et plus magiques les uns que les autres. La fameuse couronne qu’on aperçoit dans ces palpitations de la lumière polaire demeura seule complètement stable et dégagée dans son entier, et nous pûmes nous convaincre qu’elle émanait du lieu où le pic était situé, car le pic