Page:Sand - Laura - Voyages et impressions.djvu/302

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austère, je déclare que c’est de là qu’il faut la voir. De là, la composition est vaste ; le grand méandre de la Creuse, bleu comme le ciel et rayé de blanches cascades, prend une majesté singulière. Ces promontoires de verdure, ces moissons qui s’aventurent sur les terrasses de schiste noir et se penchent orgueilleuses sur l’abîme, ces dépressions imposantes de la falaise antédiluvienne, ces granits dentelés qui couronnent le nord et descendent comme des torrents pétrifiés jusqu’au lit de la rivière, ce mélange de choses terribles et de choses gracieuses, les roches nues et les veines fertiles, les arbres et les prairies côtoyant les blocs revêches, tout cela est d’un arrangement splendide, et la fantaisie n’y voudrait rien changer.

Mais, quand j’ai laissé derrière moi le village enfoui dans la gorge et sa grande prairie encaissée ; quand, du sentier qui longe le petit torrent de Gargilesse, j’arrive à sa jonction avec le grand gave, la Creuse, ce même pays vu d’en bas est un autre pays qui me semble plus beau que l’autre, et je dirais volontiers comme ce maître italien qui,