Page:Sand - Laura - Voyages et impressions.djvu/329

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Mais les chevaux ont fini de manger, et le geai de l’autre jour, le même, car je reconnais sa voix rauque et ses folles réflexions, est au-dessus de ma tête et semble rire aux éclats. C’est un bon geai au demeurant. En Berri, on l’appelle Jacques, comme partout on appelle la pie Margot, le corbeau Colas et la grive Guillaume. Il est moqueur, querelleur, bavard ; mais il a de l’esprit comme un bossu et de la gaieté à remplir une forêt. Les chevaux ont dû l’entendre de loin et se dire : « C’est là que nous étions. »

J’apprends, en arrivant, qu’on a empêché les gens de lettres, les théâtres et les artistes de Paris de célébrer l’anniversaire de Shakspeare. Qui a fait cela ? Pour plaire à qui ? Par crainte de quoi ? Qui en a eu l’idée ? Qui l’a permis ? Assurément ce n’est pas Jacques, l’Ésope grotesque de la forêt, qui aurait eu une pensée si étrange. Jamais Jacques n’a défendu aux aigles de planer ni aux rossignols de chanter. Est-ce parce que Shakspeare est protestant ? Ce doit être cela. L’année prochaine, il sera défendu de fêter l’anniversaire