Page:Sand - Le Beau Laurence.djvu/144

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et les autres reculèrent… Ils nous prenaient pour des démons.

Ils revinrent, ils croyaient que nous avions tué leur commandant, ils voulaient le venger, dussent-ils périr un à un. Vraiment ils étaient braves, et, en les terrassant, nous ne pouvions nous résoudre à les égorger. Nous l’aurions pu. À peine étaient-ils dans nos mains que leurs figures exprimaient non la crainte, mais la stupeur, je ne sais quelle horreur superstitieuse, et tout aussitôt la résignation du fatalisme devant une mort qu’ils croyaient inévitable. Nous les laissions étendus par terre et ils ne bougeaient plus, craignant d’avoir l’air de demander grâce.

Je ne sais combien dura cette lutte insensée. Aucun de nous n’en eut conscience. Autant que je pus saisir quelques mots que j’avais appris de leur langue, ils dirent que nous étions sorciers et parlèrent d’aller chercher de la paille pour nous enfumer ; mais ils n’en eurent pas le temps : une exclamation du dehors et le son d’une voix bien connue arrêta le combat et termina le siège. Le prince arrivait. Il imposa silence, fit mettre bas les armes et se présenta en criant :