Page:Sand - Le Beau Laurence.djvu/286

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

rence. Je sais qu’il s’est couché tard, nous aurons le temps. Je vous dirai en route ce qui m’amène. Je lui indiquai le chemin, je courus prendre un vêtement et je le rejoignis.

— Vous voyez, dit-il, je suis revenu sur mes pas. À Barentin, j’ai embarqué tout mon monde pour Rouen. J’ai marché toute la nuit dans une mauvaise patache ; mais j’étais tourmenté, j’avais la fièvre, je n’ai pas senti le froid. J’avais résolu de faire une mauvaise action, une lâcheté, — par égoïsme ! Je ne peux pas l’accomplir. Ce serait la première de ma vie. Impéria s’est toujours sacrifiée pour ses amis. Elle eût pu être engagée à Paris, y avoir de grands succès, y faire fortune, ou tout au moins y trouver une existence aisée et tranquille. Il y a aux Français plus d’une sociétaire qui ne la vaut pas. Elle a refusé pour ne pas nous quitter. Vous savez comment elle a agi lorsqu’elle était comblée des dons du prince Klémenti et de ses hôtes. Vous avez deviné qu’en refusant l’amour de Laurence, c’est encore à nous qu’elle a voulu se consacrer. Cela ne peut pas durer éternellement. Elle a trente ans à présent. Elle est faible, épuisée. Notre petite société ne fera jamais fortune, notre vie sera