Page:Sand - Le Beau Laurence.djvu/330

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rence ! si j’accepte le capital que tu me prêtes…

— Pardon, dit Laurence, j’espère que cette fois il ne sera pas question de restitution. Je te connais, Bellamare, l’obstacle éternel de ta vie, c’est ta conscience. Avec un capital plus mince que celui que je mets dans tes mains, tu te serais tiré d’affaire, si tu ne l’avais toujours dû à des amis que tu ne voulais pas ruiner. Avec moi, tu ne peux pas avoir cette crainte. Mon offrande ne me gênera même pas, et, quand elle me gênerait un peu, quand j’aurais à retrancher quelque chose à ma trop large opulence… Tu m’as donné trois ans d’une vie bien remplie qui a emporté toute l’écume de ma jeunesse, et dont il ne m’est resté que l’amour d’un idéal dont tu es l’apôtre et le professeur le plus persuasif et le plus persuadé… Tu as formé mon goût, tu as élevé mes idées, tu m’as appris le dévouement et le courage… Tout ce que j’ai de jeune et de généreux dans l’âme, c’est à toi que je le dois. Grâce à toi, je ne suis pas devenu sceptique. Grâce à toi, j’ai le culte du vrai, la confiance au bien, la puissance d’aimer. Si je suis encore digne d’être choisi par une femme adorable, c’est qu’au travers d’une vie folle comme un rêve, tu