Page:Sand - Le Dernier Amour, 1882.djvu/184

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loin de nous ? Et, si j’y fais de la dépense pour qu’il y soit bien, ne me dira-t-il pas que c’est inutile ?

— Allons toujours voir, répondis-je, quelle dépense on aurait à faire dans tous les cas pour entretenir cette ferme ; nous consulterons ensuite Tonino.

— Comment n’êtes-vous pas au courant de cela ? me demanda Félicie en se dirigeant avec moi vers la laiterie, qui était à une heure de chemin dans la montagne. N’allez-vous jamais vous promener par là ?

— Rarement, le temps me manque ; l’ouvrage d’en bas absorbe toutes mes journées, vous le savez bien. D’ailleurs, ceci rentre dans la vie pastorale, dont Jean ne s’occupait pas et faisait bien de ne pas s’occuper. Vous suffisiez à cette besogne à laquelle vous vous entendez merveilleusement.

La laiterie était fort belle, et le terrain environnant, de première qualité en pâturages, constituait un don assez considérable. Comme j’en faisais avec satisfaction la remarque :

— Peut-être trouvez-vous, me dit Félicie, que j’ai fait la part bien large à Tonino ?

— Non, je n’y trouve rien de trop. Les époux sont jeunes, ils auront des enfants.

— Oui, ils en auront, répondit-elle. Ils sont nés heureux, ils les conserveront.

Je vis une larme couler sur sa joue. C’était la première fois que, devant moi, elle pleurait sa fille. Jamais elle ne m’en avait parlé qu’avec une douleur