Page:Sand - Le Dernier Amour, 1882.djvu/252

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Je vois bien que je n’aurai pas d’enfants, je suis maudite ! Sylvestre en a eu, le malheur vient de moi ! Tu m’avais promis… Non, je suis maudite ! Il faudra bien que tes enfants soient les miens, quoique je ne les aime pas ; mais ce que tu voudras, je le voudrai. Sylvestre ne veut rien, lui. Je l’ai sondé encore hier soir à ce sujet, il ne veut rien. Tu n’as guère à craindre que nous ayons de la famille, puisque, d’ailleurs, tu m’ordonnes de n’être plus que sa sœur. Cela sera si tu m’aimes, je trouverai des défaites, je me dirai malade. Il est si crédule et si dévoué ! Pauvre Sylvestre ! Enfin aime-moi, tout est là. Reviens ardent et noyé d’amour comme tu l’étais d’abord. Sinon, je me tuerai, vois-tu, car je suis très-coupable, je le sais. Je ne le sens pas encore beaucoup. Tant que j’aurai de l’espérance, je ferai taire le repentir ; mais, si tu me brises, si tu m’abandonnes, je me haïrai moi-même et je ne supporterai pas la vie.

» Je te dis tout cela, il le faut ; il faut que tu réfléchisses à l’horreur de ma situation, et que tu prennes garde à toi aussi. Il ne faut pas trop te jouer de ma jalousie et porter aux nues l’imbécile paysanne que tu as épousée par dépit. Je ne réponds pas de ne la point mettre sous mes pieds, si tu la pousses à me braver. — Ah ! tiens, je deviens folle, je deviens méchante. Moi qui étais généreuse, je ne le suis plus ; tu as tué ma bonté. Je peux encore combler ta femme de prévenances et de présents ; mais me défendre de la détester, c’est impossible, quand je pense à ce