Page:Sand - Le Diable aux champs.djvu/134

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génie individuel la sympathie, la reconnaissance, l’assentiment de tout un peuple !

RALPH, regardant vers le village par-dessus la haie. — Mais que fait donc cette vierge folle, comme l’appelle Florence, au milieu de ces paysannes ?

JACQUES. — Elle est assise sur un arbre fraîchement équarri, et semble se plaire à caresser les enfants.

RALPH. — Que venait-elle donc chercher de si bonne heure dans le jardin de Noirac ?

JACQUES. — Probablement jouir de la beauté du lieu, comme nous faisons souvent. Le soleil levant ne se voile la face devant aucun être humain. Il n’a pas de préjugés, lui !

RALPH. — Appelleriez-vous préjugé le dégoût qu’inspirent ces sortes de femmes ? Tout cosmopolite que je suis devenu, je suis resté un peu Anglais sur ce point.

JACQUES. — Je ne vois pas que les Anglais aient moins de vices que les autres nations civilisées.

RALPH. — Non certainement ; mais ils sont plus rigides dans leurs opinions.

JACQUES. — C’est de l’hypocrisie en plus.

RALPH. — J’en conviens ; mais je ne suis pas hypocrite, moi, et j’ai une grande répulsion pour le désordre.

JACQUES. — Vous avez raison, et ceci nous ramène à traiter de la morale, de l’amour et de la famille.




SCÈNE IV


MYRTO, MANICHE, MARGUERITE ; plusieurs PAYSANNES, vieilles et jeunes, avec des enfants.

MYRTO. — Et celui-là, quel âge a-t-il ? deux ans ?

MARGUERITE. — Oh ! deux ans ! vous plaisantez, mam’selle ! C’est mon dernier, il a trois ans et demi.

MYRTO. — Ah ! mon Dieu ! comme c’est petit, un enfant de trois ans !