Page:Sand - Le Diable aux champs.djvu/222

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FLORENCE. — Si c’était de la pitié, qu’aurait-elle donc d’humiliant pour vous, si vous êtes sans préjugés ? L’homme offense-t-il son semblable en le plaignant dans sa douleur et dans sa faiblesse ? Autrefois, vos soubrettes et vos Frontins servaient le vice avec le mépris dans l’âme et le sourire sur les lèvres. Aujourd’hui, vous pouvez rencontrer, parmi vos serviteurs, des gens assez fiers et assez sages pour vous sauver sans vous condamner. C’est que tous les hommes tendent à devenir des hommes, et que toutes les femmes…

DIANE. — Eh bien, toutes les femmes ?

FLORENCE. — Ne sont pas des marquises de la régence qu’on se dégraderait à servir. Il en est de bonnes et d’excusables, qu’on peut respecter encore après les avoir assistées dans leurs secrets embarras, et je crois, madame, vous l’avoir humblement prouvé dans ce long entretien. Mais il est minuit ; je vous demande la permission de me retirer.

(Diane, immobile et muette, le regarde sortir.)




SCÈNE XIV


Dans l’escalier du château de Noirac


JENNY, FLORENCE.

FLORENCE, tressaillant. — Quoi ! c’est vous, mademoiselle Jenny ? Je vous prenais pour une statue. Que faisiez-vous donc là, appuyée contre la rampe ?

JENNY, troublée. — Mon Dieu, je pensais, je ne sais à quoi. Je ne vous ai pas entendu venir. Madame me demande, sans doute !

FLORENCE. — Madame est fort préoccupée aussi. Que craignez-vous donc encore toutes les deux ? Dites, Jenny, que puis-je faire maintenant pour que vous soyez contente de moi, vous ?