Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/171

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convenance, et que, dans l’occasion, toutes les nuances se rapprochent par esprit de caste ou de corps. Elle savait donc bien qu’il lui fallait des relations avec le faubourg Saint-Germain, où son mari était fort peu admis, et, grâce à madame de Villemer, dont elle avait adroitement capté la bienveillance par son babil et son infatigable serviabilité, elle avait mis pied dans quelques salons, où elle plaisait et passait pour une aimable enfant sans conséquence.

Cette enfant avait vingt-huit ans déjà et n’en paraissait pas avoir plus de vingt-deux ou vingt-trois, bien qu’elle fût un peu fatiguée par les bals ; elle avait su conserver tant de pétulance et de naïveté qu’on ne la voyait pas trop engraisser. Elle montrait en riant de petites dents éblouissantes, blaisait en parlant, et semblait ivre de chiffons et de plaisirs. Enfin personne ne se méfiait d’elle, et il n’y avait peut-être pas à la redouter, vu que son premier intérêt était de se montrer bonne et de se rendre inoffensive ; mais il y avait à se préserver beaucoup, si l’on ne voulait pas se trouver bientôt engagé vis-a-vis d’elle.

C’est ainsi que, sans y prendre garde et tout en jurant qu’elle ne ferait aucune démarche auprès des ministres du roi citoyen, madame de Villemer s’était trouvée entraînée à agir plus ou moins directement pour la retirer de sa province. Grâce à elle et au duc d’Aléria, M. d’Arglade venait d’être nommé à Paris, et sa femme avait écrit à la marquise : « Chère madame, je vous dois la vie, vous êtes mon