Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/231

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— Ah ! je ne demande pas mieux que de faire tout mon possible pour cela ! répondit le marquis en riant d’un rire doux qui l’embellit tellement que Caroline fut éblouie du regard qu’il attachait sur elle.

— Vous vous êtes donc moqué de votre mère ? reprit-elle en s’armant de toute sa défense intérieure ; voilà ce dont je ne vous aurais jamais cru capable !

— Non, non, je ne le suis pas ! répondit M. de Villemer en reprenant son sérieux. Quand ils m’ont arraché cette promesse, je ne riais pas, je vous le jure ! J’étais profondément malheureux et gravement malade ; je me sentais mourir, et je croyais mon âme déjà morte. Je cédais à de tendres et cruelles obsessions, dans l’espoir qu’on me laisserait finir en paix ; mais j’en ai rappelé, mon amie : j’ai fait un nouveau bail avec la vie, je me sens encore plein de jeunesse et d’avenir. L’amour fermente en moi comme la sève dans ce grand arbre ; oui, l’amour, c’est-à-dire la foi, la force, le sentiment de mon être immortel, dont je dois compte à Dieu et non aux préjugés humains ! Je veux être heureux, moi, je veux vivre, et je ne veux être époux qu’à la condition d’aimer avec toutes les forces de mon âme !…

Ne me dites pas, continua-t-il sans laisser à Caroline le temps de répondre, que j’ai des devoirs en contradiction avec celui-là. Je ne suis pas un homme faible et flottant. Je ne me paye point de mots consacrés par l’usage, et je ne prétends pas me faire l’es-