Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/292

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dant s’ouvrir une à une les portes des maisons, et se disant avec raison que, dans un hameau si petit et si entassé dans le rocher, elle ne pouvait errer longtemps sans reconnaître la figure qu’elle cherchait.

Mais ici un embarras se présenta. Était-elle sûre de reconnaître cette nourrice qu’elle n’avait pas revue depuis l’âge de dix ans ? Elle avait sa voix et son accent bien plus présents à la mémoire que sa figure. Elle monta et redescendit jusqu’à la dernière maison, au revers du rocher, et là elle vit écrit sur la porte : Peyraque Lanion. Un fer de cheval cloué sur l’écriteau indiquait la profession de maréchal ferrant.

Justine était levée la première selon sa coutume, tandis que les rideaux fermés d’un lit d’indienne abritait le dernier somme de M. Peyraque. La pièce principale de ce rez-de-chaussée annonçait le confort d’un ménage aisé, et l’indice de ce bien-être consistait particulièrement dans la garniture du plafond treillagé de lattes sur lesquelles reposaient de monumentales provisions de légumes et diverses denrées agricoles : mais une propreté rigide, exception rare aux habitudes du pays, en retranchait tout ce qui pouvait choquer l’odorat ou la vue.

Justine allumait son feu et s’apprêtait à faire la soupe que son mari devait trouver fumante à son réveil, lorsqu’elle vit entrer mademoiselle de Saint-Geneix avec son capuchon relevé et portant son paquet. Elle jeta sur cette étrangère un regard distrait en lui disant :