Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/317

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fiance et de toute liberté d’âme, mais de tout ce qui, au nom de Dieu, rompt sans retour les liens et les devoirs de l’humanité. Dans notre couvent, je me souviens que la vie religieuse me paraissait riante : ici, elle est d’un sombre à faire trembler.

« De la cathédrale, on descend pendant une heure pour gagner le faubourg d’Aiguilhe, où se dresse un autre monument à la fois naturel et historique, qui est bien la plus étrange chose du monde. C’est un pain de sucre volcanique de trois cents pieds de haut, où l’on monte par un escalier tournant jusqu’à une chapelle byzantine nécessairement toute petite, mais charmante, et bâtie, dit-on, sur l’emplacement et avec les débris d’un temple de Diane.

« On raconte là une légende qui m’a frappée. Une jeune fille, une vierge chrétienne, poursuivie par un mécréant, s’est précipitée, pour lui échapper, du haut de la plate-forme : elle s’est relevée aussitôt ; elle n’avait aucun mal. Le miracle fit grand bruit. On la déclara sainte. L’orgueil lui monta au cœur, elle promit de se précipiter de nouveau, pour montrer qu’elle disposait de la protection des anges mais cette fois le ciel l’abandonna, et elle fut brisée comme une vaine idole…

« L’orgueil ! oui, Dieu laisse les orgueilleux à eux-mêmes… Et sans lui que peuvent-ils ?… Mais ne me dis pas que j’ai de l’orgueil… Non, ce n’est pas cela ! Je ne veux rien prouver à personne. Je demande qu’on m’oublie et qu’on ne souffre point à cause de moi.