Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/337

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Peyraque n’en manquait pas. Il reçut M. de Villemer avec le calme et la dignité d’un homme qui a la plus austère notion du devoir. Il n’était plus question de le mettre en relations avec la prétendue Charlette ; il fallait l’éloigner sans qu’il conçût de soupçons, ou, s’il en avait, les lui ôter. Il vit, dès les premiers mots, que M. de Villemer ne se doutait de rien. Voulant repartir dans peu de jours avec son fils, qu’il comptait placer plus près de lui, il avait profité d’une belle matinée pour venir à pied s’acquitter d’une dette de cœur envers une généreuse inconnue. Il ne croyait pas que la distance fût aussi grande, il arrivait un peu tard. Il avouait être un peu fatigué, et sa figure révélait en effet une lassitude douloureuse.

Peyraque s’empressa de lui offrir à boire et à manger, l’hospitalité devant passer avant tout. Il appela Justine, qui avait eu le temps de se remettre, et on servit M. de Villemer, qui, saisissant l’occasion de récompenser largement ses hôtes, accepta de bonne grâce. Il apprenait avec regret que la Charlette était partie ; mais il n’avait aucune raison pour faire beaucoup de questions sur son compte. Il pensait laisser son présent, que Justine conseillait tout bas d’accepter, afin qu’il ne s’étonnât de rien. Caroline trouverait toujours le temps de le lui renvoyer. Peyraque n’y vit pas de nécessité : son orgueil se révoltait contre l’idée de paraître accepter de l’argent pour son compte.

Caroline entendait, de sa petite chambre, ce combat de délicatesse. La voix du marquis lui faisait passer