Page:Sand - Le Péché de Monsieur Antoine, Pauline, L’Orco, Calman-Lévy, 18xx, tome 1.djvu/193

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doublement, sans s’en rendre compte, afin d’avoir terminé aussitôt qu’elle, et de pouvoir être de la promenade.

« J’ai honte de mon inaction, dit Émile, qui n’osait pas trop regarder les beaux bras et les mouvements de la jeune fileuse, de peur de rencontrer les petits yeux perçants de Janille ; n’avez-vous donc pas quelque ouvrage à me donner aussi ?

— Et que savez-vous faire ? dit Gilberte en souriant.

— Tout ce que sait faire Sylvain Charasson, je m’en flatte, répondit-il.

— Je vous enverrais bien arroser mes laitues, dit Janille en riant tout à fait, mais cela nous priverait de votre compagnie. Si vous remontiez la pendule qui est arrêtée ?

— Oh ! elle est arrêtée depuis trois jours, dit Gilberte, et je n’ai pu la faire marcher. Je crois bien qu’il y a quelque chose de cassé.

— Eh ! c’est mon affaire, s’écria Émile ; j’ai étudié, à mon corps défendant, il est vrai, un peu de mécanique, et je ne crois pas que ce coucou soit bien compliqué.

— Et si vous me cassez tout à fait mon horloge ? dit Janille.

— Eh ! laissez-la-lui casser, si ça l’amuse, dit Gilberte, avec un air de bonté où l’on retrouvait la libérale insouciance de son père.

— Je demande à la casser, reprit Émile, si tel est son destin, pourvu qu’on me permette de la remplacer.

— Oh ! oui-dà ! s’il en arrive ainsi, dit Janille, je la veux toute pareille, ni plus belle ni plus grande ; celle-là nous est commode : elle sonne clair et ne nous casse pas la tête. »

Émile se mit à l’œuvre ; il démonta le coucou d’Allemagne, et, l’ayant examiné, il n’y trouva qu’un peu de