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LE PÉCHÉ

remonta à cheval, sortit posément du village comme il y était entré ; mais il prit le petit galop quand il fut en plaine.


XXXV.

L’ABSOLUTION.


Cependant M. Cardonnet arrivait à Châteaubrun, et déjà il était en présence de Gilberte, de son père et de Janille.

« Monsieur de Châteaubrun, dit-il en s’asseyant avec aisance parmi ces personnes consternées d’une visite qui leur annonçait de nouveaux chagrins, vous savez sans doute tout ce qui s’est passé entre mon fils et moi, à propos de mademoiselle votre fille. Mon fils a eu le bon goût et le bon esprit de la choisir pour sa fiancée. Mademoiselle et vous, monsieur, avez eu l’extrême bonté d’accueillir ses prétentions, sans trop savoir si je les approuverais… »

Ici, Janille fit un geste de colère, Gilberte baissa les yeux en pâlissant, et M. Antoine rougit et ouvrit la bouche pour interrompre M. Cardonnet. Mais celui-ci ne lui en donna pas le temps, et continua ainsi :

« Je n’approuvais pas d’abord cette union, j’en conviens ; mais je vins ici, je vis mademoiselle, et je cédai. Ce fut à des conditions bien douces et bien simples. Mon fils est ultra-démocrate, et je suis conservateur modéré. Je prévois que des opinions exagérées ruineront l’intelligence et le crédit d’Émile. J’exige qu’il y renonce et revienne à l’esprit de sagesse et de convenance. J’ai cru obtenir aisément ce sacrifice, je m’en suis réjoui d’avance, je vous l’ai annoncé comme indubitable dans une lettre adressée à mademoiselle. Mais, à mon grand étonnement, Émile a persisté dans son exaltation, et il y a sacrifié un amour que j’avais cru plus profond et plus dévoué. Je