qu’elle vient me trouver. Elle m’avait parlé tantôt, mais je n’avais pas compris. Elle n’est pas mal.
— Vous la trouvez belle ? dit Timothée.
— Pas beaucoup, répondit Abul, elle est trop jeune et trop mince ; j’aimerais mieux sa mère, c’est une belle femme bien grasse. Mais il faut bien se contenter de ce qu’on trouve en pays étranger, et d’ailleurs ce serait manquer à l’hospitalité que de refuser à cette fille ce qu’elle désire.
— Et si mon maître se trompait, reprit Timothée ; si cette fille était venue ici dans d’autres intentions ?
— En vérité, le crois-tu ?
— Ne vous a-t-elle rien dit ?
— Je ne comprends rien à ce qu’elle dit.
— Ses manières vous ont-elles prouvé son amour ?
— Non, mais elle était à genoux pendant que j’achevais ma prière.
— Est-elle restée à genoux quand vous vous êtes levé ?
— Non, elle s’est levée aussi.
— Eh bien ! dit Timothée en lui-même en regardant la belle Mattea qui écoutait, toute pâle et tout interdite, cet entretien auquel elle n’entendait rien, pauvre insensée ! il est encore temps de te sauver de toi-même.
— Mademoiselle, lui dit-il d’un ton un peu froid, que désirez-vous que je demande de votre part à mon maître ?
— Hélas ! je n’en sais rien, répondit Mattea fondant en larmes ; je demande asile et protection à qui voudra me l’accorder ; ne lui avez-vous pas traduit ma lettre de ce matin ? Vous voyez que je suis blessée et ensanglantée ; je suis opprimée et maltraitée au point que je n’ose pas rester une heure de plus dans la maison de mes parents ; je vais me réfugier de ce pas chez ma marraine, la princesse Gica ; mais elle ne voudra me soustraire que bien peu de temps aux maux qui m’accablent et que je veux