Page:Sand - Le compagnon du tour de France, tome 1.djvu/106

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meilleure intelligence pour cela. Telle autre société est ennemie née de telle autre. Dans le sein d’un même Devoir il y a des corps de métiers qui se tolèrent, d’autres qui se soutiennent, d’autres qui se haïssait mortellement. En général les sociétés nouvellement formées sont repoussées par l’orgueil des anciennes, et ne conquièrent leur droit de cité dans le compagnonnage qu’au prix de leur sang. Chaque Devoir a son code. Dans les uns il y a deux grades ; dans d’autres il y en a trois et quatre. La condition de l’aspirant est heureuse ou misérable, suivant l’esprit despotique ou libéral de la société. Enfin tous ces camps divers et dissidents sont réunis dans une même appellation, les Compagnons du tour de France.

Chaque société a ses villes de Devoir, où les compagnons peuvent stationner, s’instruire et travailler, en participant à l’aide, aux secours et à la protection d’un corps de compagnons qu’on appelle par application générique société, et dont les membres se fixent ou se renouvellent suivant leurs intérêts ou leurs besoins. Quand ils sont trop nombreux pour subsister, quelques-uns parmi les premiers arrivés doivent faire place aux derniers arrivants.

Certaines villes peuvent être occupées par des Devoirs différents ; certaines autres sont la propriété exclusive d’un seul Devoir, soit par antique coutume, soit par transaction, comme il est arrivé pour le marché de cent ans de la ville de Lyon.

Certaines bases sont communes à tous les Devoirs et à tous les corps qui les composent : et à voir la chose en grand, ces bases principales sont nobles et généreuses. L’embauchage, c’est-à-dire l’admission de l’ouvrier au travail ; le levage d’acquit, c’est-à-dire la garantie de son honneur ; les rapports du compagnon avec le maître ; la conduite, c’est-à-dire les adieux fraternels érigés en cérémonies ; les soins et secours accordés aux malades,