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PROCOPE LE GRAND.

bouclier hussitique. La famille slave eût conquis le monde à cette époque, si elle eût été unie par une même foi. Le temps de Hunniade et de Scanderbeg approchait. Quelle croisade contre les Turcs, si Procope et Ziska l’eussent commencée !

Sigismond profita de l’hiver, qui ramenait et concentrait en Bohême tous les partis, pour envoyer une ambassade et proposer la paix. Procope reçut une députation à Tabor, et se flatta de négocier une réconciliation honorable. Il obtint un sauf-conduit, et alla trouver l’empereur en Autriche. Mais Sigismond ne voulut point se départir de son autorité, et Procope n’était pas homme à transiger avec la foi et l’honneur de sa patrie. Il revint irrité de l’obstination et de la folie de l’Empereur.

Cependant les deux villes de Prague (la vieille Prague et la nouvelle) exerçant de mortelles inimitiés l’une contre l’autre, Procope jugea bientôt qu’il devait faire tous ses efforts pour procurer la paix. Il proposa de recevoir Sigismond, à condition que lui et tous ses Hongrois voulussent suivre l’Écriture sainte, communier sous les deux espèces, et accorder aux Bohémiens toutes les grâces qu’ils lui demanderaient. Procope n’était pas l’homme des concessions, et ses bonnes intentions ne pouvaient combler un abîme. On accusait les Orphelins et les Taborites de rejeter tous les accommodements, pour perpétuer une guerre de rapines qui ne profitait qu’à eux. Ces accusations étaient amères au noble cœur de Procope. Il envoya faire de nouvelles offres à l’Empereur, et ce dernier assembla une diète à Presbourg, où Procope se rendit à la tête de la députation des grands de Bohême et des seigneurs de Prague. Mais la timide politique des Calixtins voulait déborder la fière et loyale contenance du rasé. Pendant les conférences de la diète,