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PROCOPE LE GRAND.

verte, et de venir en toute confiance au concile. De peur que vous ne soyez retenus par quelque méfiance, nous sommes prêts à vous donner un sauf-conduit plein et suffisant pour venir, pour demeurer, pour vous en retourner ; et nous vous accorderons, au nom de l’Église universelle, tout ce qui pourra contribuer à la liberté et à la sûreté de vos députés. Nous vous prions, au reste, de les bien choisir, et d’envoyer des gens pieux, doux, consciencieux, humbles de cœur, pacifiques, désintéressés, chérissant la gloire de Jésus-Christ, et non la leur. »

Il y a loin de cet humble et pacifique appel au bref que, trois ans auparavant, le pape adressait aux habitants de Pilsen, pour les détourner de discuter avec ces serpents rusés, à la peau d’agneau et aux dents de loup. L’Église, consternée de ses désastres, s’efforce enfin de revêtir elle-même cette peau d’agneau ; et, au risque de la perdition des âmes, elle consent à la discussion tant repoussée et tant redoutée. Les Bohémiens s’émurent peu de tant de courtoisie. L’expérience les avait rendus méfiants, et leurs députés répondirent fièrement à Sigismond, dans une conférence convoquée par lui à Presbourg, « que toute petite qu’était la province de Bohême, elle était assez puissante pour rendre le double à ses ennemis. »

Sigismond, au moment d’aller en Italie pour son couronnement, leur écrivit encore « qu’aucune nation ne lui était plus chère que la leur, que par ses soins ils seraient favorablement reçus au concile, pourvu qu’ils ne prétendissent pas être plus sages que l’Église romaine ; enfin qu’il ne prétendait pas les gouverner autrement que les autres rois chrétiens. » Nonobstant ces airs de douceur, remarque l’historien J. Lenfant, il y avait toujours dans les lettres de Sigismond