Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol1.djvu/116

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Faites attention que je ne vous conseille pas de malmener et de délaisser votre femme, mais d’avoir la liberté de vous absenter d’elle pour tes besoins de votre condition. Si elle devenait acariâtre ou récalcitrante, on pourrait la mater par son hérésie. La liberté de conscience accordée à ces gens-là est subordonnée à des restrictions qu’ils enfreignent souvent. Nous les tenons donc toujours, à preuve que cette petite veuve ne trouve pas à se remarier. Les jeunes gens du pays, qui sont las de la guerre de châteaux, craignent d’épouser la guerre. Vous n’auriez donc pour concurrent, en ce moment-ci, que, peut-être, M. Guillaume d’Ars, qui est un modéré et qui est assidu à la Motte ; mais, à Bourges, on saura le retenir dans d’autres liens. C’est un jeune beau-fils facile à distraire. D’ailleurs, avec une veuve qui doit s’ennuyer de la solitude, il faudrait, fait comme vous l’êtes, n’avoir pas grande habileté pour échouer. Je vois, à votre sourire, que vous n’êtes pas inquiet du succès.

— Eh bien, j’avoue que vous dites la vérité, répondit d’Alvimar, qui se rappela vivement, tout à coup, l’émotion que la jeune dame n’avait pas réussi à lui cacher, et sur laquelle il avait bien pu se méprendre. Je crois que, si je le voulais…

— Il faut le vouloir… Pensez-y, répondit M. Poulain en se levant. Si vous êtes décidé, j’en écrirai confidentiellement à des gens qui peuvent beaucoup.

Il voulait parler des jésuites, qui avaient déjà ébranlé M. de Beuvre en le menaçant d’empêcher sa fille de se remarier. On pouvait rendre à ce gentilhomme sa propre tranquillité, au prix de ce mariage. D’Alvimar comprit à demi-mot, promit au recteur d’y penser sérieusement et de lui rendre réponse le surlendemain, puisque,