Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol1.djvu/150

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passe-temps, comme c’était assez la coutume des maraudeurs, je risquai le tout pour le tout.

» J’allongeai, de la botte et de l’étrier tout ensemble un grand coup de pied dans l’estomac du Macabre, qui était déjà descendu pour me jeter bas, et l’étendis tout à plat sur le dos, jurant comme quarante diables.

— Et bien vous fîtes, monsieur ! s’écria Adamas enthousiasmé.

— Les autres, poursuivit Bois-Doré, s’attendaient si peu à voir un blanc-bec comme j’étais faire pareille chose au milieu d’eux, tous vieux routiers armés jusqu’aux dents, qu’ils se mirent à rire ; de quoi je profitai pour filer comme un trait d’arbalète ; mais, leur étonnement passé, ils m’envoyèrent une grêle de prunes allemandes, que l’on appelait dans ce temps-là des prunes de Monsieur, à cause que ces Allemands servaient les desseins de Monsieur, frère du roi, contre les troupes de la reine mère.

» Le sort voulut qu’aucune balle ne m’atteignit, et, grâce à ma bonne jument Brandine, qui m’emporta dans les chemins creux et tortus de la Couarde, je rentrai sain et sauf au logis. Grande fut la joie de mon petit frère en me voyant déballer toutes ces bamboches.

»

— Mon mignon, lui dis-je en lui donnant la citadelle, bien m’a pris d’être si bellement fortifié ; car, sans ces bonnes murailles que j’avais de long du dos, je pense que vous ne m’eussiez point vu revenir.

» Le fait est, Adamas, que, si l’on décousait ce chien d’étoupe, je crois bien qu’on lui trouverait quelque plomb dans le ventre, et que, si la citadelle ne m’a point garanti, tout au moins les animaux ont dû garantir la citadelle.

— S’il en est ainsi, monsieur, je veux garder tout