Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol1.djvu/220

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un livre ascétique dont il ne se séparait jamais, et qu’il ne comprenait pas. Articuler avec les lèvres les paroles de ce livre et réciter machinalement le chapelet, telle était sa principale occupation et, ce semble, son unique plaisir.

Bois-Doré, du coin de l’œil, observait tantôt le maître étendu d’un air accablé sur son lit, tantôt le serviteur calme, austère et pieux, dont le profit monacal se dessinait sur le vitrage.

— Ce ne sont pas là des voleurs de grand chemin, pensait-il. Que diable ! ce jeune homme blanc et mince, à l’œil doux comme celui d’une demoiselle… Il est vrai que, tantôt, lorsqu’il se fâcha contre les bohémiens, et, hier, lorsqu’il déclamait contre les Morisques, il n’avait pas l’air aussi bénin que de coutume. Mais ce vieil écuyer à barbe de capucin, lisant en son livre de piété avec tant de recueillement… Il est vrai que rien ne ressemble tant à un honnête homme qu’un coquin qui sait son métier ! Allons, ma pénétration ne suffit point ici, il faut peser les faits.

Il retourna dans le pavillon qui était attribué en entier à son appartement, chaque étage se composant d’une grande pièce et d’une plus petite : au rez-de-chaussée, la salle à manger avec l’office pour la desserte ; au premier, le salon de compagnie et le boudoir ; au second, la chambre à coucher du châtelain et un autre boudoir ; au troisième, la grande salle dite des verdures[1], celle qu’Adamas décorait parfois du nom de salle de Justice ; au quatrième, un appartement vacant et non terminé.

  1. On sait qu’on appelait verdures d’Auvergne des tentures de tapisserie représentant des arbres, des feuillages et des oiseaux, sans personnages et sans paysage déterminé. On les fabriquait, je crois, à Clermont.