Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol1.djvu/276

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

— Je vous prouverai qu’ils ne l’étaient point, Guillaume, répondit Bois-Doré avec une dignité qui l’ébranla de nouveau ; jusque-là, suspendez votre ressentiment contre moi, et vos regrets pour ce méchant homme. Quand vous saurez la vérité, vous vous reprocherez peut-être de m’avoir forcé à exposer ma vie pour avoir la sienne.

— Et que ferons-nous maintenant de ce malheureux corps ? dit Guillaume, abattu et consterné.

— Je ne vous laisserai point dans des embarras pour mon compte, répondit Bois-Doré. Mes gens vont le porter au couvent des carmes de La Châtre, lesquels lui donneront la sépulture comme ils l’entendront. Je ne prétends cacher à personne l’action que j’ai faite, d’autant qu’il me reste à punir l’autre assassin. Mais je ne saurais faire de sang-froid cette laide besogne, et je compte le livrer au lieutenant de la prévôté, pour que son châtiment soit exemplaire. Adamas, tu vas le conduire. Mais où donc est mon fidèle Adamas ?

— Hélas ! monsieur, répondit Adamas d’une voix caverneuse, je suis là, à vos genoux, et bien malade de cette affaire. Un instant j’ai cru que vous étiez mort, et je crois que j’ai été mort moi-même pendant un bon quart d’heure. Ne m’envoyez nulle part ; je n’ai plus de jambes, et j’ai comme une roue de moulin dans la tête.

— Or donc, mon pauvre ami, si tu n’es plus bon à rien, nous enverrons quelque autre. Je te l’avais bien dit que tu n’étais plus d’âge à supporter les émotions !

Le marquis retourna vers les chevaux, tandis que ses gens et ceux de Guillaume enlevaient le cadavre et le roulaient dans un manteau ; mais, lorsqu’on chercha le prisonnier, ce fut en vain.

On n’avait pas eu la précaution de lui lier les jambes.