Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol1.djvu/288

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Il se rappelait encore assez confusément les graves événements de cette nuit agitée ; mais déjà il se représentait avec lucidité les grandes questions de parure soulevées la veille à propos de son cher Mario. Il l’appela pour reprendre avec lui l’entretien commencé dans le trésor. Mais il n’en reçut pas de réponse, et déjà il s’inquiétait, lorsque l’enfant, éveillé et levé avant le jour, vint, tout imprégné de la fraîche odeur du matin, se jeter à son cou.

— Et d’où venez-vous sitôt, mon excellent ami ? lui dit le vieillard.

— Père, répondit gaiement Mario, je viens de chez Adamas, qui m’a défendu de te dire un secret que nous avons tous les deux. Ne me le demande donc pas, c’est une surprise que nous voulons te faire.

— À la bonne heure, mon fils. Je ne demande rien. Je veux être surpris ! Mais n’allons-nous point déjeuner ensemble, là, sur cette petite table, auprès de mon lit ?

— Oh ! je n’ai pas le temps, mon petit père ! Il me faut retourner vers Adamas, lequel te prie de dormir encore une heure, si tu ne veux faire tout manquer.

Le marquis fit tout son possible pour se rendormir, mais en vain. Il se tourmenta de beaucoup de choses. Madame de Beuvre devait venir ce jour-là de bonne heure avec son père ; Guillaume aussi, dans le cas où son intendant irait mieux. Le dîner était-il convenablement ordonné ? Et pourrait-on présenter Mario à une dame, sous ses habits de berger des montagnes ? Et ce pauvre enfant, qui ne savait pas seulement saluer, baiser la main et dire trois mots de compliment ! Tout son charme, toutes ses grâces n’allaient-ils pas être tournés en dérision et pris en mépris par des personnes que la voix du sang ne rendrait pas aveugles ?