Page:Sand - Les Beaux Messieurs de Bois-Dore vol1.djvu/55

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et qui le roulait et le mordillait avec la brusquerie superbe d’un enfant de qualité daignant jouer avec un vilain.

D’Alvimar, au moment d’offrir son bras à la belle Lauriane, s’arrêta en voyant M. de Bois-Doré s’approcher d’elle dans la même intention.

Mais, à son tour, le courtois marquis recula.

— C’est votre droit, lui dit-il : un hôte tel que vous doit primer tous les amis ; mais sachez le prix du sacrifice que je vous fais.

— J’en sens tout le prix, répondit d’Alvimar, au bras de qui Lauriane appuya légèrement sa petite main ; et, de toutes les bontés que vous avez pour moi, j’estime celle-ci être la plus grande.

— Je vois avec plaisir, reprit Bois-Doré en marchant à la gauche de madame de Beuvre, que vous entendez la galanterie française comme le feu roi, notre Henri, de douce mémoire.

— J’espère l’entendre mieux, s’il vous plaît.

— Oh ! ce serait beaucoup promettre !

— Nous autres Espagnols, nous l’entendons, du moins, autrement. Nous croyons que l’attachement fidèle à une seule femme est préférable à la galanterie envers toutes.

— Oh ! alors, mon cher comte… Vous êtes comte, n’est-ce pas, ou duc ?… Pardon, mais vous êtes grand d’Espagne, je le sais, je le vois… Vous donnez dans la fidélité parfaite du roman ? Rien de plus beau, mon cher hôte, rien de plus beau, sur ma parole !

M. de Beuvre appela Bois-Doré à quelques pas de là pour lui montrer je ne sais quel arbre nouvellement planté, et d’Alvimar profita de cette interruption pour demander à Lauriane si M. de Bois-Doré avait voulu se moquer de lui.