Page:Sand - Les Deux Freres.djvu/111

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

le jure, je ne dirai pas un mot pour influencer Gaston.

— Vous savez qu’il a déjà parlé à Michelin ?

— Non ! Je croyais qu’il ne le ferait pas sans m’en prévenir.

M. de Salcède était ému et surpris. Je crus devoir prendre la parole pour me préserver de toute responsabilité.

— Hier soir, lui dis-je, comme je rentrais par la poterne, j’ai entendu M. Gaston dire à Charlotte qu’il venait de recevoir de Londres une somme de quarante mille francs dont j’ignore la provenance. Elle ne peut être attribuée qu’à celui qui avait promis par lettre anonyme vingt mille francs aux Michelin pour l’éducation et l’établissement de leur pensionnaire.

Madame de Flamarande sourit dédaigneusement à ce don de son mari.

— Après tout, dit-elle, ce pauvre denier lui est bien acquis ; mais qu’importe à sa résolution ?

— Je comprends, moi, dit M. de Salcède. Espérance, se voyant riche à son point de vue, et séparé de moi par le désordre qui a régné au château et à la ferme hier et aujourd’hui, s’est hâté de confier à Michelin le secret de sa fortune. De là à un engagement réciproque prématuré, il n’y avait qu’un pas, un pas très-glissant quand un amour partagé pousse à la roue ! Je ne le gronderai pas, notre enfant. Je lui dirai de réfléchir, et il réfléchira.