Page:Sand - Les Deux Freres.djvu/42

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la forcer de répondre, dans quel sens son désir serait de me voir agir :

— Mon bon Charles, me dit-elle, je n’ai rien arrêté. Que puis-je faire sans l’avis, sans la volonté de M. de Salcède ? N’a-t-il pas sur l’enfant qu’il a élevé des droits plus sacrés que M. de Flamarande n’en avait sur Roger, dont il ne s’occupait plus depuis dix ans ? Ne pas reconnaître Gaston sera de ma part, aux yeux de Gaston, l’aveu d’une faute que je n’ai pas commise. Vous me direz qu’à le reconnaître il y a un danger équivalent, celui de lui faire penser que je n’ai pas été injustement soupçonnée. Je ne pourrais me justifier qu’en accusant son père, et je ne veux pas, je ne dois pas lui faire maudire son père. Je me trouve dans une impasse, et je comprends que M. de Salcède avait raison lorsqu’il me suppliait de ne plus me faire voir à Gaston quand l’âge est venu où il devait se rappeler mes traits : j’avais promis, et puis l’enfant a eu le croup, il a été en danger, je me suis à peine annoncée, je suis accourue, et alors il m’a aimée, et moi, je n’ai plus eu le courage de l’abandonner. Je vais essayer cette fois de ne pas me montrer à lui, et peut-être sera-t-il possible de lui cacher encore que sa mère la paysanne est la comtesse de Flamarande ; mais, à moins de l’envoyer dans un pays éloigné où il ne risquera pas de me rencontrer sous mon nom, sera-t-il possible de lui laisser ignorer toujours la vérité ? Moi, d’ailleurs, je n’ai qu’un