Page:Sand - Les Deux Freres.djvu/55

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nients ne se produiront-ils pas avec la rudesse cynique qui est le propre de l’opinion ? Non, il ne sera jamais possible de dégager la veuve de M. de Flamarande d’un soupçon dont ses fils ressentiront également l’outrage, qui jettera une ombre de méfiance et de tristesse sur leur vie entière, méfiance qui les amènera peut-être quelque jour à tirer l’épée, à exposer leur vie pour la réputation de leur mère… Voyons, courage, dit encore madame de Montesparre en remettant le papier à M. de Salcède et en embrassant madame de Flamarande, qui pleurait, la tête dans ses mains : nous avons décidé que votre devoir d’épouse et de mère était d’obéir à votre mari au delà de la tombe, et vous avez reconnu que nous avions bien jugé. Soumettez-vous par amour pour vos enfants ; leur amour et leur bonheur vous dédommageront.

— Oui, oui, je le sais, répondit madame Rolande en serrant les mains de madame Berthe dans les siennes. Tout pour eux, c’est convenu ! mais laissez-moi pleurer sur moi qui ne pourrai plus voir Gaston qu’en secret et sans lui ouvrir mon cœur.

Nous étions tous profondément émus de sa douleur ; M. de Salcède se détourna pour cacher la sienne. Je vis, au soulèvement de ses épaules, que sa poitrine se remplissait des sanglots qu’il imposait à madame de Flamarande.

— Toi, pensai-je, tu es un honnête homme ; tu