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JORDY.

Vaut mieux rire de tout ça et tourner la chose en chanson.

PIOTTON.

Oui, sans doute… La chanson console de tout, quand ce n’est pas des airs séditieuses. Chantez, jeunes hommes.

JORDY, chantant.

    C’est la belle Gervaise
    Qu’a perdu son cœur,
    C’est Nicaise et Blaise
    Qu’en sont les voleurs…
    Et l’père Lustucru…

(Il s’arrête en voyant Germinet sur la porte.)
GERMINET.

Le v’là, le père Lustucru ! (À Jean.) Tu vois, Jean, la belle Gervaise en nom et en place de la belle Thérèse ! une fille qu’a deux galants. Et le père qui en rit, pas vrai ? Ah ! c’est qu’il y a d’quoi rire ! une jeunesse qui pleure… et un vieux qu’on insulte, c’est ça des amusements et des joies ! Nous as-tu mis assez bas ? Es-tu content ? Chante donc avec les autres… voyons !

JEAN.

Non, père Germinet… Jamais on n’insultera votre fille ni vous devant moi. (Aux autres.) Assez de sottises, là-bas. Je vous défends de tourner mamselle Gervaise en ridicule. Taisez-vous, et n’y revenez jamais.

JORDY.

Dis donc, Jean, tu pourrais bien dire que tu nous pries…

JEAN.

C’est pas une prière que je te fais, Jordy ; c’est un ordre que je te donne… à toi, comme aux autres. (Murmures.) La Gervaise est respectable…

JORDY, riant.

Ah ! faut respecter les filles que tu…