Page:Sand - Les Maitres sonneurs.djvu/218

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Mais comme il criait à Brulette de venir lui faire vis-à-vis, un vilain diable, sortant je ne sais d’où, se présenta et la voulut prendre par la main. Encore qu’il commençât de faire nuit, Brulette le reconnut tout d’abord pour celui qui, au bois de la Roche, avait menacé le plus, et même proposé d’assassiner ses deux défenseurs et de les enterrer sous quelque arbre qui n’en dirait mot.

La peur et l’aversion lui firent refuser bien vite et se serrer contre moi, qui, ayant épuisé mes provisions, me rendais à la danse avec elle.

— Cette fille m’a promis la danse, dis-je au muletier qui s’y entêtait. Laissez-nous, et cherchez-en une autre.

— C’est bien, dit-il ; mais quand elle aura ballé cette bourrée avec vous, ce sera mon tour.

— Non, dit Brulette vivement. J’aimerais mieux ne baller de ma vie.

— C’est ce que nous verrons, fit-il ; et il nous suivit à la danse, où il se tint derrière nous, nous critiquant, je pense, en son langage, et lâchant, à chaque fois que Brulette repassait devant lui, des paroles que ses mauvais yeux me faisaient juger insolentes.

— Attends que j’aie fini, lui dis-je en le heurtant au passage ; je te baillerai ton compte en un langage que ton dos saura bien entendre.

Mais, quand la bourrée fut finie, j’eus beau le chercher, il s’était si bien caché que je ne pus mettre la main dessus. Brulette, voyant comme il était lâche, cessa de le craindre et dansa avec d’autres, qui, tous, bien joliment, lui faisaient hommage ; mais, en un moment où je n’avais plus les yeux sur elle, ce coquin la vint prendre au milieu d’une bande d’autres fillettes, l’attira de force au milieu du bal, et, profitant de la nuit, qui empêchait de voir la résistance de Brulette, il la voulut embrasser. En ce moment, j’accourais, ne voyant pas bien, et m’imaginant d’entendre Brulette