Page:Sand - Les Maitres sonneurs.djvu/257

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Joseph comprenait si bien le grand bûcheux, qu’il le pria de jouer le dernier air qu’il avait inventé, pour nous donner échantillon de ce mode gris et triste qu’il appelait le mineur.

— Oui-dà, mon garçon, dit le vieux, tu l’as donc guetté, l’air que je m’essaye d’emmancher sur des paroles depuis une huitaine ? Je pensais bien l’avoir chanté pour moi seul ; mais puisque tu étais aux écoutes, le voilà tel que je compte le laisser.

Et, démanchant sa musette, il en sépara le hautbois, dont il joua très-doux un air qui, sans être chagrinant, donnait à l’esprit souvenir ou attente de toutes sortes de choses, à l’idée de chacun qui l’écoutait.

Joseph ne se sentait pas d’aise pour la beauté de l’air, et Brulette, qui l’entendit sans bouger, parut s’éveiller d’un songe, quand il fut fini.

— Et les paroles, dit Thérence, sont-elles tristes aussi, mon père ?

— Les paroles, répondit-il, sont comme l’air, un peu embrouillantes et portant réflexion. C’est l’histoire du tintouin de trois galants autour d’une fille.

Et il chanta une chanson, aujourd’hui répandue en notre pays, mais dont on a dérangé beaucoup les paroles. La voilà telle que le Grand-Bûcheux la disait :

   Trois fendeux y avait,
   Au printemps, sur l’herbette ;
   (J’entends le rossignolet),
   Trois fendeux y avait.
   Parlant à la fillette.

   Le plus jeune disait,
   (Celui qui tient la rose) ;
   (J’entends le rossignolet),
   Le plus jeune disait :
   J’aime bien, mais je n’ose.

   Le plus vieux s’écriait :
  (Celui qui tient la fende),