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carl

mes paupières. La scène de l’église se peignit à ma mémoire sous des couleurs si vives et si réelles, que, possédé par une sorte de frayeur insensée, je me mis à chanter la phrase fatale ; d’abord à demi-voix, comme si j’eusse voulu conjurer et repousser l’approche des esprits des ténèbres ; puis distinctement, comme si je me fusse accoutumé à leur apparition ; et puis enfin d’une voix éclatante, comme si j’eusse voulu les invoquer et m’élancer avec eux dans la vapeur qui tremble sur les abîmes au rayon de la lune. Mais quelle fut ma stupeur lorsqu’au moment où je prononçais les mots terribles :


\relative c''{
\key des \major
des4 f2 (f8.) des16
des8. c16 ees8. bes16 bes4 aes8 \bar "||"
}
\addlyrics {
Ô Dieu que ta puissance est gran- de !
}


une voix, qui semblait être la voix même du vent et des eaux, me répondit à travers les sapins et la brume :


\relative c''{
\override Staff.TimeSignature #'stencil = ##f
\key des \major
\partial8 ges'8
f8 ees8 des8 c8 bes4. des8
des2 (c2)
des4 \bar "||"
}
\addlyrics {
Ô Dieu que ta puissance est gran - de.
}

Et aussitôt, comme si toutes les voix de la nuit et tous les esprits de l’air eussent été convoqués à chanter l’hymne funèbre de Carl, du haut de chaque cime et du fond de chaque ravin, un écho répondit à la voix fantastique pour articuler, chacun à son tour, et avec une force décroissante :