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les sept cordes de la lyre

D’où il résulte que le cerveau peut entrer dans une sorte d’exaltation fébrile, ainsi qu’on l’observe chez les dilettanti.

hanz. Ô maître ! la musique est tout autre chose, croyez-moi.

albertus. La musique peut exprimer des sentiments… mais rendre des idées… mais seulement peindre des objets… c’est impossible ! À moins qu’elle ne soit une magie, comme plusieurs le prétendent. Cependant, voici des notes, des clefs, des portées, des signes pour marquer la mesure, d’autres signes pour hausser ou baisser l’intonation… Ce ne sont point là des signes cabalistiques. Ils tombent sous le sens le plus vulgaire et sont soumis à une logique invariable.

hanz. Ce sont les éléments simples et connus dont la combinaison devient un mystère, une magie si vous voulez, sous l’inspiration du génie : la langue de l’infini.

albertus. Mais le langage de cette lyre est, dites-vous, un fait exceptionnel, unique, complétement en dehors de la science des musiciens : je n’en sais rien, je n’y crois pas ; n’importe ! j’accepte l’hypothèse, et je dis que la musique n’est qu’une création, ce qu’on appelle avec raison un art d’agrément.

hanz. Le prétendu magicien qui a créé ce talisman se serait donc servi des sons, comme d’autres magiciens se sont servis de mots arabes ou de signes astronomiques ? tout cela dans le même but, qui est de marquer, par des formules quelconques, les mystérieuses évolutions de la science des nombres, science qui, selon eux, présiderait aux lois de l’univers sans l’action providentielle d’une force intelligente ? Maî-