Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/160

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désobéir. Je passais des heures avec Dolorès à la porte de son hôtel, dans la rue, pour que le médecin pût me donner de ses nouvelles à tout instant. Un jour, ce brave jeune homme, pris de compassion, me fit entrer.

» — Il est très-mal, me dit-il, et je ne veux pas qu’il meure sans vous avoir bénie. S’il lui revient un moment de connaissance, je suis sûr qu’il vous demandera. Soyez donc près de lui : en ce moment, il est incapable de s’en apercevoir.

» Je pris vite le bonnet de Dolorès, je demandai un tablier, j’entrai avec M. Breton comme une garde-malade amenée par lui. Ces précautions n’étaient pas inutiles. La sœur de M. Brudnel, cette vieille sœur revêche et prude, était dans l’appartement. M. Breton était convaincu qu’elle n’avait que des vues intéressées et que sa présence faisait souffrir le malade. Il lui persuada de se retirer en lui faisant entendre qu’il avait encore de l’espérance. Elle avait choisi à son frère une garde qui n’était dévouée qu’à elle, une vilaine créature toujours prête à s’enivrer. Le médecin l’envoya à l’office et, d’autorité, me mit à sa place.

» Je soignai mon cher Richard avec passion. Je ne dormis pas un instant pendant quinze jours et quinze nuits. J’étais toujours là, l’oreille à sa respiration, le