Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/186

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avoue qu’il vaudrait mieux attendre quelques jours de plus et ne pas inquiéter M. Brudnel. Le mal n’est pas si prononcé qu’il y ait péril en la demeure.

— Oui, parce que vous croyez que M. Brudnel…

— Eh bien ?

— Je ne peux rien dire.

— Alors ne dites rien.

Elle sortit comme dépitée, et rentra aussitôt.

— Je veux tout dire, s’écria-t-elle. Il faut que vous sauviez ma chère maîtresse ; il faut que vous engagiez M. Brudnel à dire la vérité.

— Quelle vérité ?

— C’est qu’il ne l’épousera pas ; il ne l’épousera jamais.

— Il ne l’a donc pas réellement promis ?

— Pas si réellement que Manuela se l’imagine. En tout cas, il a promis malgré lui, dans des moments de tendresse et de pitié. Au fond, il n’est pas amoureux de Manuela, il ne l’a jamais été. Il a bien été quelquefois ému auprès d’elle dans les commencements ; elle était si jolie et elle l’aimait tant ! Mais ces Anglais ! cela vous a une tête de fer. Il s’était juré, en la sauvant de son père, de ne pas l’aimer trop ; il s’est tenu parole. Il est arrivé pourtant une chose qu’il n’avait pas prévue, c’est qu’elle lui serait si fidèle et si dé-