Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/198

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peler pourquoi j’étais là et sans vouloir me le demander. Je vis qu’elle faisait des efforts pour se souvenir sans être aidée. C’était au reste l’heure de la sieste. L’appartement, vaste, sombre et frais, portait à l’indolence. L’odeur des roses du jardin pénétrait en dépit des fenêtres fermées, avec le chant aigu de la cigale.

— Voyons ! dit Manuela quand la torpeur fut dissipée, je me sens très-bien. Est-ce que Dolorès est là ?

— Elle est sortie.

— Ah oui ! je lui avais donné des commissions ; mais je n’ai pas besoin d’elle. Je veux me lever, docteur. Je suis tout habillée, donnez-moi seulement la main. Je suis encore un peu ivre, car je sens bien que vous m’avez donné de l’opium.

Je la conduisis à son fauteuil.

— Restez près de moi, dit-elle ; je vous suis à charge aujourd’hui pour la dernière fois.

— Qu’est-ce que vous voulez dire ? Encore la menace de vous laisser mourir ?

— Non, c’est fini, j’étais folle. Me voilà bien apaisée, bien raisonnable. Ne croyez pas tout ce que dit Dolorès. Je n’ai besoin ni de bals, ni de spectacles, ni de conversations. Je comprends que je ne peux pas épouser sir Richard, et j’y renonce.