Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/227

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mis en moi un espoir, un orgueil, une joie immenses ; mais cette fille adorée, que je ne peux avouer de longtemps peut-être, je ne puis l’avoir près de moi sans que la calomnie, le soupçon tout au moins ne vienne souiller sa réputation. La même injustice a atteint malgré moi la pauvre Manuela. Eh bien, il fallait empêcher un de ces malheurs et réparer l’autre. En épousant Manuela très-ostensiblement, j’assurais la considération qui lui est due ; j’offrais pour amie à ma fille une compagne légitime. Ma maison était purifiée à tous les yeux par ce mariage, et le bonheur pouvait nous réunir tous. J’arrive donc ici, après avoir fait des prodiges d’activité, croyant y apporter la meilleure des solutions ; mais l’amour va encore plus vite que la raison, et je vous surprends au milieu d’une solution toute différente. J’en ai été désappointé un instant, à cause de ma fille ; mais le mal est très-réparable. Je ferai un autre mariage, un mariage, très-sérieux, et, quant au vôtre, mes enfants, je suppose qu’après ce que je viens de dire, le docteur n’y verra plus d’obstacles et n’acceptera pas en égoïste le sacrifice romanesque qui lui était imprudemment offert. J’ai dit, Qu’avez-vous à répondre ?

— Rien ! répondit Manuela en lui baisant la main. Vous êtes un ange de bonté, et, comme toujours, mon