Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/23

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée



II


Je tâchai de paraître calme le lendemain ; je fis comme si je n’avais rien entendu ; mais je devins rêveur et bizarre, tantôt sombre, tantôt fou de gaîté. Je n’avais plus ni appétit ni sommeil ; j’étais amoureux, amoureux fou d’un fantôme, d’un être que je ne devais peut-être jamais voir, car combien de choses pouvaient se passer avant que mon père revînt à ce projet, et que ma mère ne le combattît plus !

J’eus l’idée de leur en parler, mais il eût fallu avouer que je savais tout le reste, et d’ailleurs mon amour me frappait d’une timidité invincible. C’était comme une confusion poignante au milieu d’une ivresse délicieuse.

Je rentrai au collège, espérant que l’étude me délivrerait de ce tourment ou me ferait prendre patience jusqu’à l’année suivante. Il n’en fut rien. Je travaillai