Page:Sand - Ma Soeur Jeanne.djvu/265

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ma Jeanne, il n’y a pas de temps à perdre, si tu veux servir à ton frère les mets qu’il aime.

Jeanne sortit joyeusement.

— Comme elle est transformée ! dis-je à ma mère. Cette gaieté, cette animation, je ne la reconnais plus ! qu’a-t-elle fait de ses habitudes de rêverie, de ses accès de mélancolie ?

— Tout cela s’est modifié peu à peu ; sa santé est devenue florissante.

— Mais non, tout cela s’est fait très-vite ! Ne serait-ce pas depuis le passage de sir Richard ?

— Que veux-tu dire ? répondit ma mère en me regardant fixement.

— Ah ! tiens, je n’en sais rien. M. Brudnel, dans une de ses lettres, m’a paru si frappé de la beauté et du talent de ma sœur, que c’est à se demander s’il n’en est pas tombé épris à première vue.

— Quelle folie !

— Pourquoi pas ? Le vieillard a le cœur jeune, l’imagination vive. Au moment où il s’est vu supplanté par moi, il a dit très-spontanément qu’il avait déjà en vue un autre mariage, un mariage très-sérieux. Il ignorait s’il serait agréé, mais il ne désespérait pas.

Ma mère m’écoutait en riant.