Page:Sand - Mademoiselle La Quintinie.djvu/174

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lorsqu’il ne les verrait pas venir à lui, remercierait Dieu de ce qu’ils n’ont pas besoin de lui. Est-ce ainsi que vos prêtres agissent ? Votre confiance en eux n’est-elle pas obligatoire, forcée ? Pouvez-vous les consulter sur un cas de conscience isolé ? Ne faut-il pas leur dire tout, jusqu’aux plus délicats secrets de la pudeur, jusqu’aux choses qu’un père n’oserait demander à sa fille ?

— Je ne sais pas, moi ! répondit Lucie avec fermeté. Il y a des pudeurs qui n’ont pas de secrets à révéler et qui ne connaissent pas les angoisses de la confession. Ne m’accorderez-vous pas que, pour les autres, la crainte d’avoir à révéler quelque honte devient un frein salutaire et puissant ?

— C’est un remède empirique, ma chère Lucie, que l’obligation de faire un acte impudique pour racheter l’impureté de la pensée ! Quoi de plus indécent pour une jeune fille ou pour une jeune femme que de se révéler ainsi à un homme ? C’est se jeter dans le feu pour se guérir de la brûlure. »

Lucie ne répondit pas. Elle revint à sa prétendue jalousie à propos de toi.

« Avouez, dit-elle, que vous m’avez déjà confessée à votre père ?

— Il faut croire, répondis-je, que je vous ai confessée telle que vous êtes, puisqu’il m’a renvoyé à vos pieds.

— Comme pénitence !… dit-elle en riant. Eh bien, à présent je veux que nous parlions de moi, afin que ce père, dont j’ai peur et envie, juge si je suis digne de devenir sa fille. Vrai, je n’en sais plus rien ! Interrogez-moi.

— Oh ! mon Dieu, moi, lui dis-je, une seule chose me tourmente. Votre vie a été si pure, qu’elle est écrite dans un regard, dans un sourire de vous. Vous pouvez