Page:Sand - Mademoiselle La Quintinie.djvu/199

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e pas du reste. Ne discute ni ses dogmes ni son culte, jusqu’à ce que tu aies établi en elle la base de tout principe, la sainte liberté. Tu ne pourrais entrer avec elle dans des discussions de détail, et ce serait bien en vain que tu le tenterais. L’amour te ferait taire, ou il t’emporterait dans son magique tourbillon à mille lieues de tes doctes raisonnements. Elle-même perdrait la tête, et, partagée entre son cœur et son esprit, elle prendrait peut-être de trop promptes résolutions. À mon sens, toute croyance doit être respectée dans son exercice, si la discussion de son principe ne l’a point modifiée. Laisse donc Lucie garder ses habitudes et ses amis, qu’ils soient prêtres ou séculiers, jusqu’à ce que leur influence échoue d’elle-même devant une conviction profonde de son droit vis-à-vis de tous et de toi-même. Ce droit lui apparaîtra clair et victorieux le jour où elle t’aimera d’un véritable amour, et c’est alors seulement que tu devras l’épouser et que tu n’auras pas à craindre d’influences néfastes dans ta vie conjugale. Si Lucie ne les secoue pas sans regret, ou si elle les secoue dans un jour d’entraînement pour toi, elle n’est pas la femme d’élite que tu vois en elle, ou bien elle aura de nouvelles luttes à subir contre elle-même au lendemain d’un dévouement irréfléchi.

Il faut bien le reconnaître, mon enfant, nous avons tous le droit de propagande et de persuasion ; mais nous n’avons pas d’autre droit. Que les raisons d’État augmentent ou restreignent ce droit selon les circonstances, il existe toujours dans son entier. On peut subir le fait des obstacles qui le froissent, la conscience d’un homme digne du nom d’homme ne les acceptera jamais en principe. Les catholiques, qui le nient dès qu’il s’agit de religion, le réclament, ce droit, dès qu’il s’agit de leurs intérêts ou de leur propagande. Donc, ils le reconnaissent