Page:Sand - Mademoiselle Merquem.djvu/124

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ver le moyen et l’occasion d’en être digne. Je vous le dis pour que vous ne me découragiez pas, vu que je n’ai pas l’orgueil de croire que mon mérite peut éclater de manière à vous éblouir, et sans que vous m’ayez aidé un peu. D’ailleurs, je ne suis pas à même d’illustrer par des bienfaits notoires ma pauvre vie pratique. Je n’ai pas la fortune et le crédit de M. de Montroger. Je n’ai pas les muscles de Célio Guillaume. Je suis un être très-obscur, mais très-ferme et très indépendant. Voulez-vous me mettre à l’épreuve ? Vous avez sauvé et recueilli un enfant dont la grâce ne m’a pas séduit, puisque je ne l’ai pas vu. Il est impossible qu’il ne vous soit pas très-cher. Si peu romanesque que vous soyez, il a été jeté dans vos bras d’une façon où il semble que la Providence ait voulu directement intervenir, et je sens qu’à votre place je chérirais ce pauvre oiseau réfugié dans mon sein. Vous, ne pouvez pourtant pas l’élever vous-même et le prendre auprès de vous sans donner prétexte à la calomnie. Vous le sentez, puisque vous l’avez dit à ma tante. Cet enfant est donc condamné à n’avoir pas de mère, et vous ne pourrez le surveiller d’assez près pour bien voir éclore ses réelles aptitudes. Confiez-le moi. Je serai son père et sa mère. Je me consacrerai entièrement à son éducation, il ne me quittera jamais, je lui sacrifierai tous les plaisirs de mon âge, toutes les distractions qu’il ne pourrait pas partager utilement avec moi. Il deviendra le frein, le but et le travail de toute ma jeunesse. Quand j’aurai fait de lui un homme, vous déciderez de son avenir, ou vous m’en laisserez le soin. Je suis prêt à l’adopter et à m’interdire tout autre espoir de famille… Répondez. Acceptez-vous ?