Page:Sand - Mademoiselle Merquem.djvu/180

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grille de notre jardin. Chemin faisant, il m’avoua qu’il avait raconté tout ce qu’il savait du Brésilien au petit amiral, — c’est ainsi qu’il appelait Célie, — en montant le sentier avec elle la veille au soir.

— Que voulez-vous ! dit-il, elle me questionnait sur votre compte avec tant d’autorité ! Elle voulait savoir tous les détails, avant, pendant et après l’aventure du soi-disant marquis. Je ne sais guère inventer, et puis il faut bien qu’elle sache que, si ce misérable vient à reparaître, le mieux est de lui faire descendre la falaise par le chemin des hirondelles. Je n’ai pas trahi le petit Barcot ; mais vous, je pouvais bien vous trahir sans la fâcher contre vous, et je vous réponds qu’elle a du cœur, le petit amiral, car elle a dit cent fois en parlant devons : « Quel brave enfant ! quel digne garçon ! » Elle a été très-gentille pour moi aussi. Elle m’a remercié comme si ça en valait la peine, et elle m’a bien recommandé de ne pas vous laisser assassiner par ce bandit. « Quand on pense, disait-elle, qu’il pouvait le tuer, là, à deux pas de moi et à cause de moi ! Vrai, votre jeune ami a trop de courage. Il n’est pas taillé en Hercule normand, lui, et il n’a pas la méchanceté et la perfidie de ce chat sauvage que vous appelez Rio-Negro. » Je l’ai rassuré de mon mieux en lui disant que la force était dans le cœur, et que vous étiez aussi méchant qu’un autre quand il le fallait. « C’est égal, disait-elle, je ne dormirai plus tranquille tant que ce bandit sera ici. » Ma foi mon cher, c’est une bonne fille et point du tout sotte ni bégueule. Je suis capable d’aller à son audience et à ses cours, elle me l’a permis.

Nous arrivions, rien ne put décider Stéphen à entrer pour saluer ma tante ; il se sauva en promettant