Page:Sand - Mademoiselle Merquem.djvu/190

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

mais l’impudence me révolte. Voyons, venez-vous à la Canielle, ne fût-ce que pour savoir ce qu’elle pense de tout ça ? Qui sait ? elle sera peut-être contente d’en causer avec vous !

— Partons, répondis-je.

Et nous prîmes, à travers les taillis, le sentier qui conduisait directement au donjon sans descendre à la grève.

Le vieux majordome n’attendit pas que je lui eusse parlé d’une affaire pressée que j’avais à communiquer à sa maîtresse. Mademoiselle avait prévu que je me présenterais ; elle avait donné l’ordre de m’introduire. Ainsi elle m’attendait ! J’étais si troublé, que j’eusse souhaité retenir Stéphen, mais il se retira vite en me disant :

— Si vous avez quelque chose à me communiquer, vous savez où me trouver.

Célie était seule au salon. Elle ne recevait que moi, personne ne viendrait nous interrompre ; mais ce moment si ardemment espéré était arrivé sur les ailes du désespoir.

Elle me reçut avec une sorte de joie contenue ; son regard, que je n’osais chercher, appelait courageusement le mien. Je me présentais avec le trouble de l’accusé, elle avait presque la bienveillante sérénité du juge ; elle me tendit la main en disant :

— Vous voilà déjà ? C’est bon signe. Nous allons pouvoir parler raison.

— Vous m’attendiez ? lui dis-je.

— Oui, je savais bien que vous ne partiriez pas sans me dire un bon adieu, auquel j’ai droit.