Page:Sand - Mademoiselle Merquem.djvu/285

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qu’en public. Eh bien, nous satisferons à la loi sociale quand nous pourrons ! Qu’importe ? ne sommes-nous pas mariés du jour où nous nous sommes dit que nous nous aimions ? Un homme comme vous et une femme comme moi craignent-ils de se manquer de parole, et leur faut-il prendre les hommes à témoin pour compter l’un sur l’autre ? Tenez, mettez votre main dans la mienne, nous nous appartenons à jamais…

— Oui, marraine adorée, je crois, je suis sûr, je suis heureux et fier, mais… mais je suis fou, et…

— Taisez-vous, dit-elle en rougissant, ce n’est pas ici qu’il faut me rappeler que je vous appartiens.

— Vous m’appartenez dès ce jour ? m’écriai-je, éperdu et comme étouffé par la joie ; vous ne remettrez pas à l’époque indécise et peut-être lointaine de la publicité l’entière effusion… ?

Elle mit sa main, sur ma bouche et ses yeux seuls me répondirent ; mais quel regard profond, ardent et brave ! Jamais abandon de la volonté ne sut allier ainsi la volupté de l’amante à l’héroïsme de l’amie. Célie Merquem ne pouvait être faible qu’avec son propre consentement. Surprendre ses sens eût été l’entreprise d’un lâche ; elle savait si bien mettre sa grandeur et sa gloire à se rendre !…

Nous entendîmes les grelots des chevaux de poste qu’on avait été chercher à Fécamp. Nous échangeâmes un seul baiser, et elle mit à son corsage une fleur de liseron blanc en me disant :

— À bientôt ! Je pars la première, restez ici le dernier pour que Montroger parte après moi, et revenez demain au Plantier, vous y trouverez mon premier rendez-vous.