Page:Sand - Mademoiselle Merquem.djvu/55

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» — Vous êtes un ange pour moi, me dit-elle. Ce que vous avez été pour mon père, ce que vous avez tenté pour me rendre si tendresse, je ne n’oublierai Jamais, et ma vie entière, que je ne peux pas vous consacrer, sera du moins la preuve de ma reconnaissance.

» Je voulais qu’elle s’expliquât. Elle ne me répondit que par ces deux mots :

» — Vous verrez !

» Je dus la quitter sans comprendre. Je me flattais quand même, et, ouvrant mon cœur à ma mère, je la suppliai de retourner à la Canielle dès le lendemain, de s’y installer et de soigner Célie avec tant de tendresse, qu’elle pût enfin lui arracher le secret de son âme impénétrable.

» Ma mère lui en voulait toujours un peu. Néanmoins, elle fit ce que je souhaitais ; mais elle ne put la voir. Mademoiselle Merquem gardait le lit, et Bellac, d’accord avec le médecin, demandait qu’on la laissât dormir. Il lui fallait mourir ou retrouver deux ou trois jours de repos absolu.

» Le surlendemain, mon père alla demander de ses nouvelles. On n’avait pu la faire dormir qu’avec l’opium ; elle dormait enfin : j’attendis encore deux jours, et j’allai m’informer moi-même. Elle était partie !

» Oui, partie avec Bellac, un vieux domestique et une vieille servante. En s’éveillant du sommeil factice qu’on lui avait procuré, elle avait été en proie à une excitation nerveuse effrayante. Le médecin consulté, Bellac avait ordonné le départ. On avait fait les paquets à la hâte, on avait gagné en voiture la prochaine station, on avait pris la route de Paris, sans