Page:Sand - Malgretout.djvu/192

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seulement, ma dignité exige qu’il ne se croie plus enchaîné à moi. Tenez, voici tout ce qui constate nos mutuelles promesses. Un brin d’herbe roulé et noué en anneau. J’ai déroulé ce fétu desséché, et je l’ai mis dans une enveloppe à son adresse. Il comprendra que je n’ai pas brisé ce lien fragile avec dépit, mais que je l’ai dénoué avec calme et précaution. Prenez ! Je vous charge de le lui envoyer, et, puisque vous m’avez arraché mon secret, je vous somme, au nom de l’estime à laquelle j’ai droit, de ne pas lui donner d’explication.

Nouville prit le gage sous enveloppe et le mit dans son carnet. Il se leva, marcha dans la chambre et, revenant à moi :

— Vous avez tort de m’interdire la vérité ! Vous aimez mieux qu’il vous croie inconstante et capricieuse qu’offensée ? Il souffrira mortellement dans les deux cas ; mais, dans le premier, il se croira autorisé à vivre à tout jamais sans réflexion et sans retenue ; dans le second, il n’accusera que lui-même, et l’amère leçon peut lui être salutaire.

— Si vous croyez cela, dites-lui la vérité. Je sacrifie ma fierté à son intérêt.

— Vous êtes bonne et grande, je le sais bien ! Il le sentira. Son repentir sera profond, et il réparera ses torts.

— Vis-à-vis de lui-même ? Dieu le veuille ! mais il n’a rien à réparer envers moi. Il avait le droit de m’oublier. Ce droit est réciproque. C’est peut-